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01.12.23

Pourquoi peut-on croire à un sursaut de la production de fleurs coupées en France ?

C’est un phénomène désormais bien connu : aujourd’hui en France, près de 85 % des fleurs mises en vente sont des fleurs importées. Face à la concurrence internationale, la production de fleurs en France s’est progressivement réduite drastiquement. Pourtant, en raison d’une volonté des consommateurs de se tourner vers des produits locaux et d’une production française à la fois plus respectueuse de l’environnement et misant sur la diversité, il est permis de croire au sursaut. 

Le constat : la production française apparaît malmenée 

Aujourd’hui, la consommation de fleurs en France est fortement dominée par les importations. Le dernier rapport de France Agrimer sur la balance commerciale de la France en matière de produits horticoles fait état d’un déficit structurel très net. “Pour l’année 2022, les importations de fleurs coupées en France représentaient par exemple près de 320 millions d’euros, pour 20 millions d’euros d’exportation”, relate Claude Chailan, délégué du conseil spécialisé Végétaux Spéciaux de FranceAgrimer, qui englobe l’horticulture. 

Sous l’effet de ces circuits internationaux bien ancrés, le nombre d’exploitations floricoles en France s’est considérablement réduit. Ainsi, on considère que sur les 8000 exploitations spécialisées en 1985, on n’en dénombre aujourd’hui plus que 278. A titre d’exemple, le tissu production d’Île-de-France est spectaculaire : sur les 650 exploitations enregistrées lors du recensement agricole de 1988, on n’en dénombre aujourd’hui une vingtaine. Enfin, dans son dernier observatoire structurel, France Agrimer estime qu’entre 2019 et 2021, le nombre d’entreprises spécialisées dans la floriculture a diminué de 19 %. 

En parallèle de cette baisse du nombre d’entreprise, on constate également une diminution constante des surfaces exploitées pour la production de fleurs coupées, de l’ordre de 27 %. En revanche, le chiffre d’affaires généré par les fleurs françaises a augmenté de 20 % en raison de la forte demande et la hausse mécanique des prix qui en a découlé. Bien entendu, l’effet covid a un impact notable sur le regain d’intérêt pour les fleurs françaises. 

En revanche, ces constats restent à modérer dans la mesure où la production de fleurs en France est encore mal connue. En effet, si FranceAgrimer dispose de nombreux indicateurs concernant les entreprises agricoles, à travers le recensement agricole et son observatoire structurel, la nature de la production française reste encore mal connue. En cause : la très grande variété d’espèces produites en France passe sous les radars de la douane. 

Contrairement à d’autres secteurs du marché agricole, analyser précisément la fleur n’est pas une mince affaire. Tout d’abord, il existe près de 20 000 variétés de fleurs différentes produites en France ; sur cette immense diversité, seules 6 ou 7 disposent d’une référence dans la nomenclature douanière”, détaille Claude Chailan. Conséquence : les fleurs de fleurs sont complexes à suivre, et ne permettent pas toujours de se faire une idée précise de l’état de la production en France. 

Pourtant, malgré ces signaux qui apparaissent défavorables, on peut légitimement croire à un sursaut de la production de fleurs en France, et ce pour plusieurs raisons. 

Parce qu’il existe une vraie demande de la part des consommateurs

Pourtant, la demande en fleurs françaises est bien présente, notamment depuis la pandémie, qui a encouragé un retour des consommateurs vers des produits de proximité. “Au moment du Covid, on a senti une volonté de se tourner vers l’achat local de la part des consommateurs. Je pense que cela a été l’occasion d’un nouveau regard sur la production de fleurs en France, qui ont aussi eu un regain d’intérêt pour les fleurs saisonnières”, selon Véronique Brun, déléguée chez Verdir, la fédération des horticulteurs de France. 

Cet intérêt dépasse largement le contexte du Covid, et révèle les nouvelles aspirations des consommateurs en matière d’environnement. “Nous vivons une période particulière où les enjeux de sobriété et de transition écologique sont au cœur des préoccupations des consommateurs”, abonde Claude Chailan de FranceAgrimer. Cette tendance est d’ailleurs perceptible chez les détaillants, comme le relate Gilles Sonnet, fleuriste à Fontaine-lès-Dijon : “Je sens une véritable envie de retour au local de la part de ma clientèle, et c’est pourquoi nous en proposons autant que possible sur nos étals”.

Cette tendance se traduit principalement par la mise en valeur d’espèces saisonnières, encouragée par l’évolution du contexte économique. Ainsi, selon Véronique Brun de Verdir : “l’augmentation du prix de l’énergie a rendu moins intéressante la culture sous serre chauffée et a poussé les producteurs à se tourner vers des fleurs de pleine terre comme la pivoine ou les fleurettes”.

Cette demande croissante pour les fleurs françaises est fondamentale pour envisager une revitalisation à long terme, puisque c’est elle qui conditionnera ou non le dynamisme de la production de fleurs en France. “Il ne faut pas oublier un point essentiel : c’est bien la demande qui crée la mise en production : à la fin, c’est toujours le consommateur qui est juge”, glisse Véronique Brun. “Si les consommateurs sont nombreux à vouloir se procurer de la fleur française et de saison, cela va automatiquement stimuler l’offre, et encourager les producteurs dans leur démarche” conclut-elle.

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Parce que l’horticulture française fait l’objet d’un regain d’intérêt

Bien que la production française soit régulièrement annoncée sur le déclin, d’autres indicateurs pourraient bien nuancer le constat. C’est en tout cas ce qu’a mis en lumière le projet Bleu Blanc Fleurs, réponse d’Excellence Végétale, association de valorisation du végétal, à un appel à projet de France Agrimer en 2021. Son objectif est d’établir un recensement de la production française et de “faciliter la structuration de la filière horticole française en s’appuyant sur les labels en place”, selon Malorie Clair qui pilote le projet. Parmi les labels, on retrouve par exemple la Charte Qualité Fleurs qui garantit la tenue des fleurs en vase, ou encore Fleurs de France qui répertorie les fleurs issues de la production nationale. 

A l’origine du projet, l’impact massif du Covid sur les floriculteurs français  : “La fleur coupée n’était alors pas considérée comme un produit essentiel : or, comme il s’agit de produits périssables, les producteurs ont dû massivement jeter leurs fleurs faute d’acheteurs, ce qui a été une étape particulièrement douloureuse pour eux” relate Malorie Clair d’Excellence Végétale. 

Le projet repose sur un enquête qualitative réalisée auprès des floriculteurs français, dans la perspective de mieux connaître leurs productions, mais aussi de déterminer les outils les plus efficaces pour leur permettre de se structurer. “Nous avons mis en place des journées techniques, instants de partages où les professionnels peuvent obtenir les appuis et bonnes pratiques nécessaires à la pérennité de leur activité, aussi bien d’un point de vue technique que commercial”, poursuit-elle.

Parmi les premiers résultats de l’enquête, Excellence Végétale a déterminé que la démographie des floriculteurs français comportait quelques surprises. “Le premier constat est une vision relativement inédite de la population horticole, qu’on présente souvent comme très masculine et approchant de la retraite”, résume Malorie Clair. Une nouvelle population qui était passée sous les radars, en raison de la petite taille de leur structure. “Nous avons identifié de nombreuses exploitations de petite taille, tenues majoritairement par des femmes de 35 à 45 ans en moyenne, et qui sont davantage issues de la reconversion”.

Ce qui permet de valider une intuition de la fédération Verdir : “Nous voyons énormément de personnes en reconversion ouvrir leur exploitation. Il s’agit souvent d’un choix de vie, dans la mesure où ces personnes souhaitent exercer un métier qui correspond davantage à leurs valeurs”, selon Véronique Brun. 

Ces exploitations témoignent non seulement d’un regain d’intérêt pour les métiers de l’horticulture, mais représentent également un vivier de richesses à long terme. “Toutes ces petites structures représentent un fort potentiel de développement, à condition d’avoir accès à tous les outils nécessaires”, conclut Malorie Clair.  

Parce qu’il existe un véritable savoir-faire français

A ces motifs d’espoir nouveaux s’ajoutent des certitudes durables concernant la production de fleurs en France. Tout d’abord, le pays dispose d’une richesse climatique qui lui permet de cultiver de très nombreuses variétés de fleurs différentes. “La France a un climat particulièrement favorable à la production de fleurs, et certaines variétés saisonnières peuvent s’épanouir sous nos latitudes sans serres chauffées, comme c’est le cas de la pivoine du Var”, confirme Véronique Brun de Verdir. Par ailleurs, fleur la plus cultivée de France, la pivoine fait office d’emblème du renouveau de la production de fleur en France.

Car la France excelle dans la production de très nombreuses variétés de fleurs “environ 20 000” selon Claude Chailan de France Agrimer ; “parfois près de 2000 variétés différentes dans certaines pépinières”, précise Véronique Brun. Ce nombre de variétés témoigne de la grande capacité d’innovation des producteurs français, sans cesse à la recherche de nouvelles variétés à produire. Mais cela prend du temps, afin de garantir une qualité optimale des espèces mise en commerce, comme nous l’explique Madame Brun de Verdir : “mettre de nouvelles variétés sur le marché peut prendre du temps car elles doivent être testées plusieurs années en stations d’expérimentation pour s’assurer de leur tenue en vase”.

Enfin, les horticulteurs français sont particulièrement attentifs à l’impact environnemental de leur activité : “Les horticulteurs français sont engagés depuis très longtemps dans une réflexion sur l’impact environnemental de leur activité, en entreprenant par exemple des démarches de certification comme Plante Bleue” détaille Véronique Brun. Cela passe notamment par un usage raisonné des pesticides, qui intègre les cahiers des charges des divers labels à disposition des producteurs : “l’usage de phytosanitaires fait l’objet de démarches de réduction, notamment à travers la mise en place de la protection biologique intégrée (PBI), qui consiste à substituer l’usage de pesticides par l’introduction de prédateurs dans les cultures

Et cette attention environnementale promet d’être renforcée par le biais des labels, comme le souligne Malorie Clair : “Nous avons élargi les conditions d’accès à la Charte Qualité Fleurs (Ndlr : Charte garantissant une tenue en vase de 7 jours pour les fleurs coupées) en ajoutant des critères environnementaux”.

Parce que tous les acteurs ont envie de travailler ensemble

A différentes échelles, tous les acteurs de la filière semblent exprimer la volonté de travailler de concert, même si des incompréhensions demeurent : “On a eu l’impression que les fleuristes boudaient un peu les nouveautés qu’on pouvait leur proposer” selon Véronique Brun de Verdir.

Pourtant, du côté des fleuristes, la volonté de faire plus de place aux fleurs françaises sur leurs étals est bien présente : “Quand on propose des fleurs qui viennent de Hollande,  c’est toujours un compromis : s’il existait une alternative française, on les proposerait avec plaisir” nous confie Marie Ruillard, fleuriste chez Maison Marguerite au Mans.

Pour répondre à cet enjeu, proposer des outils communs est une nécessité. C’est dans cette perspective qu’Excellence végétale va mettre à disposition dès l’année prochaine d’une cartographie de tous les producteurs labellisés, afin que tous les acteurs, fleuristes, grossistes et même consommateurs, puissent accéder simplement à l’ensemble de la production française. “Nous souhaitons que toutes les informations dont nous disposons soient accessibles simplement, aussi bien pour les consommateurs que pour tous les professionnels de l’horticulture” ajoute Malorie Clair d’Excellence Végétale.

 

Louis Savatier, Cofondateur et Responsable Plaidoyer

Qui sommes nous ?

Sessile lutte pour l’indépendance des artisans fleuristes sur Internet. Fondé en 2019 par 6 amis, Sessile rassemble 500 fleuristes, engagés dans la transformation de la filière et permet déjà de livrer plus de 50% des Français. En brisant la logique de catalogue sur Internet, le réseau met en avant le savoir-faire de chaque fleuriste et contribue à faire vivre l’art floral. Les fleuristes peuvent faire vivre leur passion et conçoivent des bouquets plus créatifs car ils sont ainsi plus libres de proposer des fleurs de saison, des fleurs locales quand c’est possible.